On apprend rien de nouveau dans cet article, mais ça rappelle de bons souvenirs, et il faut dire que c'est quand même une belle histoire. Même si on était pas là il y a quinze ans, nous aussi ça fait des années qu'on rêve de tout ça et qu'on se régale
Mieux que dans ses rêvesL'Institut National de Sport et d'Education Physique (INSEP) est situé dans une dense forêt de chênes et de châtaigners à l'ouest de Paris. Cette école est un centre d'entraînement unique en Europe, une sorte de pensionnat pour athlètes doués.
L'INSEP a produit 20 des médaillés olympiques français des Jeux d'Eté 2008 à Pékin. 16 des médaillés des Jeux d'Athènes 2004 sont sortis de cette école.
Elizabeth Riffiod, une des meilleures basketteuses françaises, a développé son jeu à l'INSEP. Quelques décennies plus tard, Elizabeth y inscrivait aussi son fils : Boris Diaw.
"Je me souviens de la visite à l'INSEP, raconte Diaw, ma mère me disait : "Ah oui, ce bâtiment était déjà là, mais pas celui-ci". Elle avait beaucoup de souvenirs."
Il y a un souvenir plus marquant que les autres. C'est à l'INSEP qu'Elizabeth a rencontré un talentueux athlète de saut en hauteur originaire du Sénégal, l'homme qui deviendrait le père de son fils, Issa Diaw. Boris, 15 ans, écoutait ces histoires en visitant le campus, les yeux pleins d'étoiles. Il y avait tant d'athlètes, mais si peu de basketteurs.
A l'époque de cette visite, aucun Français n'avait jamais joué en NBA, et Diaw n'avait aucune raison de croire qu'il serait parmi les premiers. Mais une fois inscrit à l'INSEP, il a rencontré un garçon un peu bravache, pas du tout effrayé par l'absence des Français dans l'histoire de la NBA. Tony Parker.
"Tony savait qu'il allait y arriver. Il n'y avait aucun Français en NBA. Pas un seul. Il n'y avait quasiment aucune chance de le faire. Mais c'était pas possible de dire ça à Tony. Il s'était mis ça dans le crâne."
Une amitié est née. L'imagination tournait à plein tube. Quinze ans plus tard, ils vivent dans une réalité dont même Parker n'osait pas rêver : deux anciens petits prodiges français qui jouent dans la même équipe NBA, avec une chance de gagner le titre.
Ils n'ont pas fait la fête à moitié le 23 mars, quand les Spurs ont signé Diaw. Parker a ouvert sa maison à Boris et lui a donné, non un canapé, mais sa propre chambre, que Diaw occupe aujourd'hui. Aussi merveilleux que ce moment ait été, ce n'est rien comparé au 8 avril, quand le coach des Spurs Gregg Popovich a placé Diaw dans le 5 majeur face à Utah.
"Quand Pop a dit que Boris débutait le match, c'était comme dans un rêve, a déclaré Parker après que les Spurs ont battu le Jazz 114 à 104. On a grandi, joué au lycée ensemble, on rêvait tous les deux de NBA, mais je n'aurais jamais cru qu'on serait dans le même 5 majeur aux Spurs, la meilleure équipe de la NBA."
L'odyssée vers la NBA a commencé à l'INSEP, un campus de 18 hectares composé de salles de sport et de cours, et de dortoirs. Sous la houlette du rude Lucien Legrand, les basketteurs subissaient de longs, épuisants entraînements. Legrand a un jour déclaré à un journaliste français : "Il faut aimer souffrir et avoir de grandes qualités morales et physiques... La meilleure récompense, c'est quand un ancien étudiant revient et dit : "Lucien, tu as fait de ma vie un enfer, mais tu avais raison.""
Diaw et Parker vivaient dans le même couloir. Ils jouaient ensemble, mangeaient ensemble, révisaient ensemble. Ils s'asseyaient même à côté, au fond de la classe, avec un autre ami, le futur pivot du Heat, Ronny Turiaf.
Diaw était-il un élève sérieux ? "J'étais assez sérieux", répond-il dans un demi-sourire.
Il se rappelle encore de l'horaire exact de ses cours du matin et de l'après-midi, du déjeûner, des entraînements deux fois par jour, du dîner et des études du soir. La vieille routine quotidienne reste aussi fraîche dans sa mémoire qu'un anniversaire important. Il est des souvenirs encore plus frais, encore plus doux : ceux de leurs jours sous les couleurs de l'équipe de France junior.
En 2000, Diaw et Parker menaient une équipe de challengers contre l'équipe largement favorite de Croatie à l'Euro des moins de 18 ans. Dans les dernières secondes d'un match interminable, Diaw sort un important contre pour redonner la possession à la France, menée d'un point. La balle ne revient pas à Parker, sorti pour 5 fautes. Elle revient à Turiaf, qui n'avait pas mis un panier de tout le match.
"Turiaf a mis un layup au buzzer. On a gagné en double prolongation", raconte Diaw.
Parker a reçu le MVP du tournoi. "De grands souvenirs. Quand on a gagné la médaille d'or, tout ce qui comptait pour nous, c'était le basket. Il n'y avait pas d'argent. Pas d'agent. Pas de pression. Juste du plaisir."
Cette victoire est entrée dans l'histoire et annoncé une suite à l'international. Cinq membres de l'équipe de France junior sont devenus des joueurs NBA. Mickael Pietrus et Yakhouba Diawara ont rejoint Parker, Diaw et Turiaf aux Etats-Unis.
Quand les Spurs ont drafté Parker en 2001, Diaw s'est réjoui et a pris l'avion pour passer Noël avec son meilleur ami. Si ce n'est pas un présage. Diaw a rencontré les coaches des Spurs et s'est fait connaître de l'organisation. "J'ai vécu tout ça, dit-il, à travers les yeux de Tony."
Onze ans plus tard, le voilà qui partage une maison, un vestiaire et un terrain avec Parker. Que peut-on imaginer de mieux ? Dans deux mois, Diaw pourrait à nouveau faire la fête, un trophée à bout de bras, avec un vieil ami de lycée.
La version originale ici :
http://www.nba.com/spurs/features/120418_rodriguez_diaw